La rhytine de Steller

rhytine de steller

Un animal qui a aidé à la survie des hommes

Novembre 1741. Un équipage de marins se retrouve échoué sur l’île du Commandeur, dans les eaux glaciales nordiques entre l’Asie et l’Amérique. Leur capitaine, l’explorateur Vitus Béring, est décédé quelques semaines plus tôt. Leur mission avait été de découvrir si la Russie est reliée au continent américain, et ils avaient trouvé le fameux détroit qui portera désormais le nom de leur capitaine. Ils avaient aussi pris l’Alaska au nom de la Russie.

Mais leur navire est maintenant dans un état si mauvais qu’il leur est impossible de reprendre la mer. Et ils s’affaiblissent, plusieurs d’entre eux mourant du scorbut. Comme par miracle, un énorme mammifère marin est repéré par un naturaliste allemand qui s’était joint à l’expédition, Georg Wilhelm Steller. Faisant près de onze mètres et étant relativement facile à capturer, les marins n’hésitent pas à faire de cet animal leur repas et trouvent sa chair délicieuse, son goût rappelant celui du veau. Non seulement l’animal leur permettra de survivre, mais il leur redonnera la force nécessaire pour se reconstruire, en six semaines, une embarcation à partir des vestiges du St-Peter, et reprendre la mer en direction de leur port d’attache, dix mois après leur naufrage, soit en août 1742.

Type d'animal Endroit où il habitait Raison de l'extinction
Mammifère marin Mer de Béring Chasse

Nomenclature

Nom latin: Hydrodamalis gigas
Autre nom en Français: vache de mer

Morphologie et comportement de la rhytine de Steller

L’animal en question n’est autre que la rhytine de Steller, un mammifère marin partageant la famille des siréniens avec le dugong et le lamantin. Elle fut baptisée « vache de mer » par le naturaliste Steller, qui la comparait aux vaches parce qu’elle passait la majeure partie de sa journée à manger les algues qui croissaient dans les eaux peu profondes le long des rives.

Peu de gens ont pu observer et décrire l’animal, et les écrits du naturaliste Steller sont précieux pour comprendre la rhytine.

« Ces animaux, comme les bovins, vivent en troupeau dans la mer, mâles et femelles nageant ensemble et guidant leur jeune jusqu’au rivage. Ils ne sont préoccupés que par leur nourriture. Le dos et la moitié de leur corps sont toujours visibles en dehors de l’eau. Ils mangent de la même façon que les animaux terrestres… Ils arrachent les algues des rochers avec la racine et les mâchent sans arrêt… Lorsqu’ils mangent, ils bougent la tête comme les buffles, et après quelques minutes, ils lèvent la tête hors de l’eau et prennent de l’air frais dans un bruit de souffle semblable à celui des chevaux. »

« L’animal ne monte jamais jusque sur la rive, restant toujours dans l’eau… Sa peau est noire et épaisse, rappelant l’écorce d’un vieux chêne… Sa tête est petite par rapport au corps. L’animal n’a pas de dents, mais est plutôt muni de deux os plats – une sur le côté supérieur, l’autre sur le côté inférieur de la mâchoire. »

sirenia

À l’âge adulte, la rhytine atteignait jusqu’à onze mètres et pesait aux alentours de 8000 kilos. Son corps était semblable à celui du dugong, mais sa queue ressemblait à celle d’une baleine. Son cuir solide était épais d’environ trois centimètres, et il recouvrait une couche de graisse de plus de 20 cm. Ses yeux et ses oreilles étaient minuscules, son nez plat, et de grandes vibrisses entouraient sa gueule.

Steller décrit la rhytine comme un animal monogame, portant un seul petit à la fois. La gestation aurait eu une durée de plus d’un an. Elles auraient vécu en troupeaux comprenant mâles, femelles et jeunes, ces derniers nageant généralement dans le centre du groupe. Les liens entre les animaux semblaient forts, et Steller rapporte le cas de certaines rhytines tentant de rescaper celles qui se faisaient attraper.

Les troupeaux étaient souvent repérés en eaux peu profondes, flottant près de la sortie d’un cours d’eau, ce qui laisse suggérer qu’ils cherchaient des endroits où l’eau non-salée était disponible. Ils broutaient et se reposaient presque toute la journée.

Histoire de l'extinction

Lorsqu’elle fut découverte par Steller, la population de la rhytine ne devait pas dépasser les 2000 individus, et son territoire était relativement restreint. Les expéditions russes qui ont suivi ont eu raison de l’animal. On la chassait pour la chair, la graisse et le cuir, ce dernier servant à la confection de petites embarcations, de couvertes de bateaux, de ceintures et de chaussures. On rapporte aussi que le lait fut tiré de plusieurs femelles et que, délicieux, il était bu tel quel ou transformé en beurre.

Les rhytines étaient lentes et ne craignaient pas l’homme, portant peu d’attention aux bateaux et aux hommes qui les approchaient. Les Russes les chassaient au harpon ou au fusil. Environ une rhytine sur cinq ayant été touchées était finalement capturées, mais les survivantes ne se sauvaient au large que pour mourir éventuellement de leurs blessures.

La toute dernière rhytine est morte en 1768, soit 27 ans après sa découverte.

Toutefois, des fossiles de rhytines nous démontrent que son territoire fut autrefois plus vaste et que sa population était nombreuse. En effet, on en a découvert du Japon jusqu’aux côtes ouest de l’Amérique du Nord. Ce qui laisse supposer que dans des temps beaucoup plus anciens, soit il y a plus de 12 000 ans, les hommes de ces côtes ont pu, eux aussi, chasser l’animal jusqu’à le faire disparaître de ces régions, les dernières rhytines restant confinées aux régions jusque là inaccessibles à l’homme, comme les îles du Commandeur.

Se pourrait-il qu'elle ne soit pas éteinte?

C’est possible!
Dans les années 1800, les prétendues observations de rhytines de Steller n’étaient pas rares, et plusieurs se sont ajoutées au cours du XXème siècle.

Il est plus difficile de déterminer l’extinction d’un animal marin que d’un animal terrestre, puisque plusieurs individus peuvent survivre et se déplacer vers des régions marines où ils ne seront que très rarement rencontrés par l’homme.

2 Comments on “La rhytine de Steller

  1. Pingback: Le Dodo - Mémorium

  2. Un nouveau specimen de rhytine de Steller, l enorme mammifere de 7 metres de long qui a vecu dans la mer de Bering jusqu au siecle, se rappelle a notre memoire grace a la decouverte fortuite d une biologiste russe.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *